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D’après les sites anglophones Wikipedia et Bring a Trailer


Prototype Triumph Fury 1964La Triumph Fury est un prototype de cabriolet deux portes conçu et réalisé à Coventry en 1964 par la Triumph Motor Company. C’est la première Triumph à structure monocoque. La carrosserie est due au crayon du styliste Michelotti. La voiture utilise les composants de la berline Triumph 2000, propulsée à l’époque par un moteur six cylindres de 2.0L, le même que celui qui motorise la Triumph GT6. Pour les véhicules de production, Triumph envisageait d’utiliser le moteur six cylindres de 3.0L ou mieux encore, le moteur V8 3.0L de la future Stag.

La voiture rompait avec la technique du châssis séparé propre aux modèles TR, qui perdurera avec la présentation de la Triumph TR5 en août 1967, puis la TR6, la plus produite de la série.

Refusant d'investir dans une nouvelle ligne de fabrication et de développer l’outillage nécessaire, Triumph décida de ne pas donner suite au prototype Fury, préférant poursuivre la série des TR utilisant la technique du châssis séparé.

Le prototype Fury existe toujours et serait parfaitement opérationnel. Un négociant du Surrey le proposa même à la vente en juillet 2009, au prix ni exagéré ni bradé de 45.000 £.

C’est un plaisir de contempler la Triumph Fury, avec ses lignes italiennes si fluides et l'amusante signature des Triumph dessinées par Michelotti, le bossage qui suit la portière. Si les phares intégrés rappellent les Maserati des années 1970, les jantes à rayons demeurent typiquement britanniques. L’arrière de la voiture se termine fort élégamment, le regard n'étant accroché ni par une « véronique », ni par un bouchon de réservoir apparent. Les feux arrière verticaux semblent inspirés de ceux de l’Aston-Martin DB6, mais ils sont nettement plus seyants. Enfin, lorsque les phares sont relevés, l’allure de l’avant est totalement différente.

 

Prototype Triumph Fury 1964A l’intérieur, les sièges « baquet » et la planche de bord plate en bois sont du meilleur goût, rien à redire ! A priori, personne ne sait si l'unique prototype a été restauré ou s'il a toujours été préservé en état d’origine, malgré les années. D’habitude, les prototypes sont donnés aux dirigeants de l’entreprise ou aux stylistes pour leur usage quotidien, comme celui-ci qui est demeuré opérationnel. On découvre sous le capot le moteur six cylindres en ligne qui anime la Triumph GT6. Et là, on en est sûr, la voiture a été restaurée car personne n’a jamais vu un moteur aussi propre sur une Triumph utilisée sur route !

Pour conclure, ce prototype est passionnant à bien des égards, d'abord par son côté unique et novateur, ensuite par son style si attrayant. N'oublions pas que l'on est en 1964 !



A quoi ressemblait le futur en 1964

Revue Classic Cars N°452 Mars 2011


Triumph Fury

Il serait facile de prendre la Fury pour une Spitfire revisitée, mais avec ses phares escamotables à fonctionnant sur la dépression moteur et son pare-chocs arrière chromé, cette nouvelle voiture était totalement différente. D’abord, elle était beaucoup plus volumineuse, ensuite et c’est essentiel, elle mettait fin à une longue tradition  chère à Triumph : construire les voitures de sport sur un châssis séparé. Ce prototype est le point de départ d’une vue commune de l’avenir de Triumph par l’ingénieur Harry Webster et le styliste Giovanni Michelotti.

Michelotti était l’un des stylistes italiens les plus prolifiques des années soixante et soixante-dix. Il naquit en octobre 1921 et fut apprenti chez Farina durant les années trente avant de fonder sa propre entreprise en 1949. Il travailla en free-lance pour d’autres grands carrossiers, citons entre autres : Ghia, Bertone et Vignale.  Parmi les succès auxquels il a participé, on note la Maserati 3500 GT, la BMW 700 et la Lancia Aprilia Coupé, mais il travailla aussi souvent pour son propre compte.

Chargé de dessiner une voiture destinée au marche égyptien, Raymond Flower prit contact avec Standard Triumph pour acheter des éléments de Standard Eight. Bien que ne disposant pas de projet, Flower se faisait fort de réaliser un prototype sous trois mois. Harry Webster, le directeur industriel de Standard-Triumph, pensait qu’un tel délai était insuffisant, mais se dit que si un tel défi était relevé, il pourrait aussi dessiner une voiture pour Triumph. Dix jours plus tard, Flower revint avec cinq ou six dessins et demanda : « Lequel préférez-vous ? » et fixa le budget de sa contribution à 3.000 £ pour la voiture complète, somme étonnamment faible même pour les années cinquante. Quand Webster alla en Italie découvrir le prototype quasiment terminé, il découvrit que le véritable auteur du projet était Michelotti. Il signa avec lui des contrats pour d’autres projets, jetant ainsi les bases d’une nouvelle collaboration en association avec Vignale. En 1957, Webster donna pour mission à Michelotti de dessiner une voiture complète, qui donna naissance à la Triumph Herald. Après ce succès, il devint le principal styliste de Triumph, responsable de tous les modèles de la TR4 à la Stag. Seule la TR6, redessinée par « l'allemand » Karmann, échappa à son crayon « italien ».


Triumph FuryD’après Graham Robson, directeur des opérations sport et rallyes de 1962 à 1965, Triumph pensa courant 1964 à envisager la production d’une voiture de sport monocoque, à l’image de la MGB. Le projet de nom de code « Fury » fut confié à Michelotti. Il s’agissait d’une voiture de sport moderne à deux portes, animée par le moteur Triumph six cylindres en ligne de deux litres de cylindrée. Trois mois plus tard, Michelotti avait donné naissance à un élégant projet de cabriolet deux portes, la première Triumph à structure monocoque. L’ingénieur David Eley conçut la structure et la partie mécanique, utilisant le plus souvent possible des composants existants, comme les suspensions et les trains roulants de la Triumph 2000. Les panneaux de carrosserie de la Fury furent réalisés manuellement, dans un atelier caché de l’usine Triumph de Canley. Le prototype portait le numéro de série X479 et fut utilisée comme exemplaire de pré-production à partir de 1965. Il ne fut immatriculée pour un usage routier qu’en 1968. La voiture subit des essais limités aux mains de l’essayeur en chef Fred Nicklin et de son adjoint Gordon Birtwistle, mais ne fit pas l’objet d’une évaluation complète. Certes, il n’y eut pas de véritable plan de production à proprement parler, mais Triumph prouva qu’il était capable de produire une voiture de sport dotée d’une structure monocoque en acier.

La première fois que l’on découvre la Fury, il est difficile de résister à la tentation de caresser de la main ses courbes fluides. Les phares rétractables et la calandre constituée de simples barres d’aluminium donnent une allure simple et nette à l’avant de la voiture. La courbe qui suggère l’épaule de la voiture présente une ligne très pure d’une grande finesse. Un examen de détail plus approfondi montre qu’il s’agit bien d’un prototype. Le pare-chocs et le pan coupé arrière rappellent la Triumph 2000. Les curieux inserts noirs en caoutchouc des butoirs de pare chocs semblent rajoutés et les cabochons en plastique blanc des indicateurs de direction avant ressemblent à des bandes de papier adhésif. Mais pour un prototype unique, la qualité et l’ajustage des panneaux de carrosserie sont particulièrement réussis, tout comme les différents badges. Un logo Fury chromé prend place derrière la porte du phare droit et un logo TR Fury orne le tableau arrière. Aujourd’hui, la voiture est en excellente condition, après avoir été restaurée par son propriétaire actuel John Ward, au sein de sa « Patrick Collection » de Birmingham. L’aspect originel de l’intérieur a été conservé et n’a nécessité que peu de travail, alors que la peinture de la carrosserie assez fatiguée a dû être refaite.

Au-delà de la fascination de la voiture, le côté pratique demeure omniprésent. Le grand capot permet un accès facile au moteur et à l’autre extrémité, le coffre à bagages offre aux touristes un volume suffisant. Le deploiement de la capote est facile et rapide, mais comme il fait beau aujourd’hui, elle restera repliée. En ouvrant la portière, vous découvrirez que l’assise des sièges en vinyle noir est très longue, avec une forte déclivité vers l’arrière et s’élargissant vers l’avant, au droit des genoux. Ces sièges sont particulièrement confortables et avec le volant réglable, la position de conduite est agréable. Devant les yeux, le tableau de bord en bois veiné, désormais traditionnel chez Triumph, reçoit l’instrumentation sur fond noir et cerclée de chrome de la TR4, ainsi que l’autoradio onde moyennes à boutons poussoir. Au centre du tableau de bord, un panneau triangulaire accueille trois cadrans : la pression d’huile en haut, en bas la jauge de carburant à droite et la température d’eau à gauche. Il n’y a pas d’ampèremètre, le bon fonctionnement étant confirmé par un simple voyant.

Triumph FuryLa Fury fut la première Triumph à recevoir un alternateur en lieu et place de la dynamo. Face au conducteur, le compte-tours est gradué jusqu’à 7.000 tours-minute et l’indicateur de vitesse laisse augurer d’un optimiste 140 Mph. Le six cylindres en ligne « baratte » immédiatement, avec une sonorité juste suffisante pour laisser deviner une affriolante GT, différente du bruit rauque caractéristique des voitures de sport. La première vitesse s’enclenche sans problème, relâchez le frein à main et c’est parti. Les commandes au volant, non marquées, réservent quelques surprises, avant de découvrir, c'est inattendu, que celle de gauche est dédiée à la levée et à l’allumage des phares encastrés et celle de droite aux indicateur de changement de direction. La direction à crémaillère est précise mais elle devient un peu dure à faible vitesse et parfois dans les virages serrés. La boîte de vitesses provient de la TR4 et la suspension arrière à roues indépendantes est celle de la berline Triumph 2000, avec des bras semi-oscillants renforcés en alliage. Cela donne à la voiture un bien meilleur comportement que celui des TR, meilleur aussi que celui des futures Stag. Les freins ne sont pas assistés, mais les disques avant et les tambours arrière remplissent parfaitement leur rôle, avec un excellent ressenti. C’est une voiture dans laquelle on se sent immédiatement à l’aise. On ressent un léger roulis et l’on est surpris par l’accroche des étroits pneumatiques Vredestein Sprint Classics 155SR15. Et cela vous incite à freiner tard, à lever le pied en sortie de virage pour provoquer un amour de glissade. Mais attention à la punition : une arrivée trop rapide dans un virage serré sans réserve de puissance suffisante pour faire décrocher l’arrière est sans appel, c’est un redoutable sous virage.

Les rapports de la boîte de vitesse sont bien adaptés au couple moteur, situé assez bas. Vous pouvez enclencher sans problème la vitesse supérieure des 1.500 tours-minute, sans trop pénaliser l’accélération. Si l’échappement se manifeste à haut régime, la voiture reste discrète dans l’ensemble. Bien placé, le court levier de vitesses est agréable et l’embrayage sait se montrer léger. Ces qualités permettent des changements de vitesse rapides et l’espacement des pédales est idéal pour la pratique du talon-pointe. Le très souple et robuste moteur six cylindres à quatre paliers semble fait pour tourner éternellement, mais il faut quand même passer le rapport supérieur quand le compte-tours entre dans la zone orange, à 5.500 tours-minute. Mais si vous êtes vraiment pressé, il vous reste le secteur rouge, entre 6.000 et 7.000 tours-minute. Par rapport aux standards des années soixante, les performances de la Fury sont excellentes, du moment que l’on considère la voiture comme la GT rapide qu’elle voulait être, en deçà de ce que pouvait suggérer son nom. Comme voiture de tourisme, elle était légitimement au sommet de sa catégorie.

Même vitres latérales descendues, le pare-brise et les déflecteurs protègent suffisamment des turbulences. Mais cette voiture aurait été bien meilleure si elle avait été motorisée par le six cylindres en ligne de 2.5 de cylindrée. La structure conçue par l’ingénieur Eley était capable d’encaisser 160 Cv, voire davantage. Si le développement d’un tel projet avait été poursuivi, il aurait donné naissance à l’une des meilleures voitures de sport de l’époque. La version coupé, programmée depuis l’origine, ne vit jamais le jour. Que devint le projet Fury ? Bien qu’abandonné, il contribua fortement à l’essor de la Stag. Triumph pensa bien à équiper la Fury du moteur V8, mais elle aurait été en concurrence directe avec la Stag.

Après que British Leyland ait volé au secours de Triumph en 1960-61, la pression du gouvernement pour rationaliser l’industrie automobile conduisit à l’abandon du projet Fury, qui aurait fait de l’ombre tant aux Spitfire qu’aux MGB et plus tard à la Stag. Triumph renonca à investir dans l’outil de production nécessaire à la fabrication de voitures à structure monocoque. Cet investissement aurait pourtant permis à la production en masse de voitures modernes, compétitives sur de nombreux marchés. Après ce renoncement, Triumph se concentra sur le développement de la TR3A, puis extrapola le six cylindres en ligne de 2.5 litres pour lancer la TR5.

Par bonheur, la Fury échappa au sort de bien des concept cars, la destruction. Elle fut vendue en 1968 et fait désormais partie de la collection d’automobiles classiques de John Ward. Sans doute le dessin de Michelotti était-il trop en avance pour son temps. Plutôt que de devenir le succès commercial escompté, la Fury est entrée dans l’histoire, aux côtés de fabuleuses voitures certes viables, mais qui n’ont jamais réellement existé.


Triumph Fury

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